La palette de Pierre

La palette de Pierre

SAISON 2 "José"


Manuel

 

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"Etude d'un torse" par Picasso à 11 ans

 

 

 

 

musique du film "1492 Christophe Colomb" 

 

 

 

 

 

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Manuel

 

 

 

 

Futile discrétion dont tous riaient bien fort

Tant José chérissait son « vague camarade »,

En cachant ses parents malgré de vains efforts

Pour qu’on n’en sache rien, provoquant la marrade !

 

Manuel est son cousin venant de Malaga.

Il conduit « le petit » pour son premier voyage : 

Pablo, Diego, José… aux prénoms qu’on blagua,

Et paye leur pension d’ouvrage en nettoyage.

 

À huit années déjà, Pablo vient de troquer

Les balais du chantier contre un peu d’aquarelle

Et le voilà noyant des ombres à croquer

Sur un lit de papier d’arlequin sans marelle.

 

Manuel qui l’encourage en balayant pour deux

Adore les visions du « Pablito » fébrile,

Mais s’inquiète parfois de son air cafardeux

Quand au chantier l’on raille ses dessins virils.

 

Un dimanche en tenant la ville en son écrin,

Ils ont semé leurs pas d’un peu de cette Espagne

Laissée pour quelque temps à l’horizon serein

D’un séjour à Montmartre et du bon temps qui gagne.

 

La palette des fleurs repeignant le crépi

Des murets accrochés aux courbes de la Butte

Encombre les pensées de Pablo sans répit,

L’engageant à ne fendre son destin sans lutte.

 

Manuel a deviné que Laurine et José

Sillonnent d’espérance une affection timide.

Les lignes de leurs mains se frôlent sans poser

Un baiser de tendresse sur leur cœur humide.

 

Pablito s’en amuse et malaxant la pâte

Façonne leur passion en vibrante sculpture.

Au début, Jean criait,  mais ce biscuit appâte

Les belles du quartier friandes de culture.

 

Le soir, de leur fenêtre assoupie sur Paris,

Manuel et Pablito songent aux Andalouses,

À Dona Maria comme à Sainte Marie,

Priant pour que Laurine et « leur José » s’épousent…

 

 

 

 

 

Pierre Barjonet

Février 2019

 

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28/02/2019
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L'exposition

 

 

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"C'est Pairs" (Vincent Scotto 1874/1952) Orgue mécanique

 

 

 

 

 

 

 

 

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Avant propos :
Cette fois, c'est Laurine elle-même qui conte son " expédition " avec Maureen et José à la découverte de l'exposition universelle de Paris en 1889. Son "aventure " dans le train sous le tunnel est donc bien la sienne.

 

 

 

 

 

 

 

 

L’exposition

 

 

 

 

Quittant notre omnibus, José, Maureen et moi,

Lorgnons l’Exposition, l’unique parisienne.

L’accueil des chocolats décorés de chamois

Nous hisse aux Ponts Roulants, déposant nos draisiennes.

 

Nous pourrions tout autant nous prendre pour des Perses,

Des Incas, des Lapons, voir la Cité lacustre,

Ou le pays de Siam, les Huns sans que ne verse

Notre bel équipage en ces contrées illustres.

 

Il n’aurait pas fallu négliger un tricot

Pour ce jour si vaillant malgré la chaleur diurne.

Voguant de la Norvège aux stucs de Jéricho,

Étrange est notre cap entre Mars et Saturne.

 

Perchés aux Troglodytes on se croit mordus

Par le froid des cavernes et des sauvageonnes.

Dansant sous les tambours des peaux-rouges perdus,

Buffalo Bill saura contenter les pigeonnes ! 

 

Les colonies serties de nos protectorats

Accueillent le Consul de riche Cochinchine.

 Les reporters sont fiers, servant leur lectorat. 

Les fanfares claironnent couvrant les machines.

 

Assommés, nous partons contempler les Beaux-Arts.

Fragonard et Moreau s’offrent à nous séduire

Gravant en notre cœur des merveilles sans fards,

Cédant à l’illusion d’oser les reproduire.

 

Ah, ce chemin de fer traversant deux tunnels

Où José pris ma main me murmurant sa flamme !

Et ce buffet charmant goûtant une prunelle,

Masquées par nos ombrelles, faut-il que l’on nous blâme !

 

Et… Divine surprise, au palais des joyaux

Qu’un bouchon de diamant coiffant une carafe

S’amuse à nous tenter par des trésors royaux !

Sur le grand livre d’or, n’y laissons qu’un parafe…

 

Galerie des parfums, José s’évapora.

Puis le voici soudain, précédé de flagrances

Offrant à notre mise une eau qui honora 

Les reines de ce monde et les dames de France.

 

 

 

 

 

Pierre Barjonet

Février 2019

 

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24/02/2019
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Bâtard

 

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" Bistro-Fada " Film " Minuit à Paris "

 

 

 

 

 

 

 

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Bâtard

 

 

 

 

 

Attends, il n’est point temps ! Jean n’a pas oublié

Dans sa cave enfumée par le frêne et le charme

Qu’il imprime à son four la loi du sablier,

Accompagnant José peinant dans ce vacarme.

 

Jean l’avait invité pour façonner du pain

Doré de tradition sans vertes fumerolles,

Nourri du bois d’antan, blâmé des galopins

Rivés à leur charbon coloré de pétrole.

 

Maintenant, il est temps ! Enfouissant les pâtons

Qui se gonflent d’orgueil dans l’ardente fournaise,

José reste attentif au retour de bâton.

Rien ne doit détourner la veille de ces braises !

 

C’est qu’il s’est dépassé ce « carrier de bâtard »,

Relevant le défi d’ouvriers sans vergogne

Qui, moquant sa naissance en pays de Cathares,

Riaient de l’Assistance et des fichues cigognes !

 

José s’était juré de réussir « son pain » !

Le pain dur à gagner, par delà les montagnes,

La couche des vallées, les Causses sans sapins,

Les bourgs du pays d’Oc, de France loin d’Espagne.

 

C’est ainsi qu’il grandit ce compagnon vaillant,

Suivant par les chemins l’arche des cathédrales,

Taillant la pierre noble et toujours travaillant,

Puisant sa vérité dans l’honneur du Saint Graal.

 

Échauffées, attisées par l’offrande du four

Exhalant des effluves fort enveloppantes,

Déboulent les « deux sœurs »  enflammées que s’y fourrent

Des fougasses dorées si tendres et pimpantes.

 

À José victorieux dominant son pétrin,

Laurine lui sourit esquissant une œillade.

Vibrant de ce bonheur, Jean s’approche et l’étreint,

Maureen sert du café puis dans la mie, taillade.

 

À la pointe du jour, José prend deux paniers,

Trimbale sa fournée d’escaliers en venelles,

Les offre aux tâcherons qui ne pourront plus nier

Son aisance à la tâche en talent fraternel.

 

 

 

 

 

 

Pierre Barjonet

Février 2019

 

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22/02/2019
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Le maquis

 

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film : Rosemary's baby (piano)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Le maquis

 

 

 

 

Un jour n’y tenant plus, Laurine voulut voir

Son taudis devenu, sa boueuse ruelle.

Entre les rues Lepic, Caulaincourt, cette foire

Du maquis de Montmartre s’ouvrait si cruelle.,

 

De sa naissance obscure qui n’éclairait pas

Son enfance diaphane privée de lumière,

Elle avait trop souvent ignoré son repas.

Ayant atteint six ans, elle fuit sa chaumière. 

 

On l’avait retirée du monde des gourbis.

 Ayant fait voile alors pour la terre d’Irlande

Où les trèfles sauraient recouvrir son fourbi,

Elle s’épanouirait sous le crin des shetlands.

 

Saint-Patrick lui offrit Maureen pour horizon,

Les lacs et les cascades pour rincer sa fange.

L’accent anglais chassa sans nulle autre prison,

Son jeune argot titi du maquis sans les anges !

 

Mais la vie n’est que drames semant la pâleur

Des graines de Circé, l’infâme qui sépare

La tendresse de l’âme en autant de malheurs,

Et tourmentant Laurine en forçant son départ !

 

C’est en allant quérir de la farine en vrac

  Que Laurine battit le pavé des impasses.

À l’eau de la fontaine aux miracles qu’on traque

Désaltéra l’envie de revoir cet espace.

 

La Tour du philosophe ayant planté pignon

Jetant sur ses disciples ses piteux poèmes,

Il s’en verrait souvent des catins en chignon,

Des voyous en goguette et fripons de bohème.

 

Sentant qu’on la mâtait, Laurine accéléra,

Abjurant son quartier, son passé, sa gâtine.

Des larmes labourées du joug d’un scélérat,

Les escaliers de bois avaient gardé patine.

   

Ondulant du sordide et des fleurs de pavot

La menant à Westport et Paris sans disgrâce,

S’imprime son destin la sortant du caveau

Par l’aube flamboyante en la pitié des grâces.

 

 

 

 

 

Pierre Barjonet

Février 2019

 

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19/02/2019
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L'ascension

 

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Les lumières de la ville  (Charlie Chaplin)

 

 

 

 

 

 

 

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L’ascension

 

 

 

 

Il est tôt ce matin que déjà les chevaux

Ballotant du harnais contiennent leur allure.

La ville est engorgée de ces landaus rivaux

Bousculant les coupés à chaque bosselure. 

 

Assis dans un fiacre clouté de cuir qui blesse

Nos amis déroulent la chaussée de basalte.

Ils encombrent ravis la foule qui se presse 

 Soulevant aux faubourgs des nuages d’asphalte.

 

On suffoque déjà quand se dresse la Tour.

Nos coiffes oscillent sous la brise de Seine,

Nos jupes coupées droites vrillent nos atours

Comptant sur leurs bottines pour nous mettre en scène.

 

Galamment, c’est José qui retient l’ascenseur

Jusqu’au troisième étage ébloui de vertige.

Nous restons étourdies, glacées tel un penseur,

Figées comme donzelles perdant tout prestige.

 

Puis le vent nous engage à tousser vers le bas

En suivant le ressac des marées parisiennes,

À l’aplomb de ce phare aux trop nombreux débats.

Nous plaquons nos chapeaux comme des Arlésiennes.

 

Par bravade soudain, nous nous hissons en haut !

Surplombant l’océan des poutrelles qui fouettent,

Nous jouant des éléments titillant notre peau,

Susurrant à la Seine des vagues de mouettes.

 

Notre soif étanchée, nous plongeons de niveau.

Du palier du deuxième en escaliers à suivre,

Glissant dans la volière d’arcs et soliveaux

L’hélice nous aspire en sa rampe de cuivre.

 

Au premier, nous trinquons, goûtant de la vodka,

Un blinis au caviar dans le restaurant russe.

Des ouvriers sifflotent gravant sans fracas

Nos prénoms sur du fer rivé de papyrus.

 

Au sol portant au ciel ses amarres de fer

 La Tour nous fait un signe d’amour et de maille

Croisant pour nos destins l’espoir qu’elle profère

D’un nouveau siècle heureux enrichi de semailles.

 

 

 

 

 

Pierre Barjonet

Février 2019

 

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17/02/2019
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La Tour

 


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Tu le r'verras Paname (Lydia Mayo et Eric Breton - 1917)

 

 

 

 

 

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La Tour

 

 

 

 

Enfer et damnation, ils ont osé le fer ! 

Les hommes enrageaient contre ce festival,

Envers et contre tout, bavards devant « l’affaire ».

C’est qu’elle les provoquait leur grande rivale…

 

Le chantier s’agitait des terribles ragots

Annonçant que la Tour serait la lavandière

De leurs pierres blanchies, oubliées sans magot.

Compagnons d’infortune à l’humeur incendiaire !

 

Mais Laurine et Maureen admiraient ce lointain,

Cet horizon percé d’un vaillant obélisque,

Planté dessus la brume en aiguille d’étain.

Elles tentaient en vain d’en minorer le risque.

 

Pourtant José souriait, mais il était bien seul,

À partager l’avis des cousines fébriles

Militant pour la Tour, réfutant son linceul.

  Les autres compagnons n’y voyaient que périls.

 

Maintenant que Maureen aidait pour les paniers,

Les hommes redoublaient d’une danse gestuelle

Faisant valser le feu des outils bien maniés,

Bûchant de leur polka, leurs pierres habituelles. 

 

C’était à qui ferait étalage d’effort

À les flatter, les bougres, leurs fraîches boulangères.

Mais José rougissait, et fuyant l’inconfort

De son cœur aux abois, se calait de gougères.

 

Une fois se lançant, il leur fit miroiter

De les conduire au bas de la Dame aux dentelles.

Puis de les hisser par l’ascenseur convoité

Jusqu’au bureau d’Eiffel que rien ne démantèle. 

 

Il faudra se hâter de visiter la Tour

Qui sera démontée par triste dérobade

Après l’Exposition, ne laissant rien autour

Qu’un champ vide de sens et d’amour sans aubade.

 

Et tout en affûtant les dents de son marteau

José scrutait le ciel en soignant l’espérance.

Il conduirait ses « sœurs » au plaisant concerto

Donné devant la Tour de laque de garance.

 

 

 

 

 

 

Pierre Barjonet

Février 2019

 

 

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14/02/2019
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Maureen

 

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" The Irish Rover " (cliquer pour écouter)

 

 

 

 

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Maureen

 

 

 

 

Tintant en mi bémol, la clochette annonça

Le sosie de Laurine en guise de cousine.

De ses rivages celtes, elle renonça,

S’exilant de Westport, victime de saisine.

 

Dans ses bras et pleurant en la dévisageant,

Laurine se souvint d’un voyage en Irlande.

Elle avait adoré, la présentant à Jean,

Maureen cueillant pour elle des ajoncs des landes.

 

Ensemble elles couraient grimpant sur les murets

Bâtis par les forçats de la Grande Famine.

Puis elles rebouchaient les terriers des furets

En chipies dégoûtantes et ne payant de mine.

 

Chaussées pour leurs huit ans de solides galoches,

Elles s’imaginaient revenir de la pêche

Frétillant d’un butin, mais c’étaient des taloches

Qui les accompagnaient quand c’était jour de prêche.

 

Elles s’étaient perdues, ça fait déjà quinze ans.

La tourbe avait brûlé les jeux des « sœurs jumelles ».

Avec son apprenti, désamorçant le temps,

Jean les dévisageait, la tête pêle-mêle.

 

Les yeux verts toutes deux, fines de taille aussi,

Elles étaient troublantes ces riantes oiselles.

Leurs cheveux flamboyaient en un chignon grossi

Cuivrant la coiffe rousse de ces demoiselles. 

 

À la mode d’ici, Laurine était tenue. 

Modelée d’élégance par l’ample tournure

Discrètement bordée de rubans soutenus

Sa robe de velours rêvait d’enluminures.

 

Elle a mené Maureen réserver du tissu

Dans le marché Saint-Pierre, en toile serpentine.

Enfin chez un bottier d’une voie sans issue

A fait confectionner de légères bottines.

 

Puis en redescendant boulevard Rochechouart

Et guettant le soleil, munies de leurs ombrelles,

Nos filles ont bien ri de voir filer des couards

Que les sergents de ville ôtaient de leurs querelles.

 

 

 

 

 

Pierre Barjonet

Février 2019

 

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11/02/2019
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Pastorale

 

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Ave Maria (piano) Bach / Gounod

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pastorale

 

 

 

En cette fin de siècle embrumée de linceuls

Le progrès vient chasser les derniers romantiques.

Bravant leurs fondations, des hommes forts en gueule

Revoient la tradition des monuments antiques.

 

Les temples n’y échappent en tant que bâtiments.

Le curé de Saint-Pierre rongé par l’angoisse

Sait bien que son église encourt un châtiment.

On veut la démolir, méprisant sa paroisse.

 

Ruinant le Sacré-Cœur par son clocher bancal,

Ils inaugureraient Saint-Jean couvert de briques.

Quel horrible destin ployant sa pastorale

Sous le nouveau béton coulant de leurs fabriques !

 

Las, il imagina fervente procession

Offrant au Mont-Cenis la foi du bas Montmartre.

Passant rue Gabrielle au cours de l’ascension,

Relâcherait chez Jean vieux pèlerin de Chartres.

 

Laurine dont on sait son goût pour le piano

Conduirait de concert les psaumes et cantiques.

Porté par la piété des pures sopranos

Saint-Pierre soutiendrait sa chapelle gothique.

 

Le curé commanda cierges et chandeliers

Puis il fit dessiner l’épreuve du message

Chargeant le boulanger d’en trouver l’atelier.

Laurine connaissait un peintre de passage.

 

De courage elle s’arma, remontant son passé,

Refusant de poser même en robe très sage,

Puis revint au dessin priant les trépassés.

De l’artiste elle obtint une bien pieuse image.

 

 À l’office on la vit sublimer l’harmonium,

Épousant la splendeur de la Nef et des voûtes,

Déroulant une fugue digne d’un podium,

Offrant à Notre-Dame une aria qui envoûte.

 

Mais il était écrit que reniant la bonté

Des bigotes fanées voudraient perdre Laurine.

Sans vergogne à l’évêque en mensonge éhonté,

Ces furies ont tenté d’imposer leur doctrine.

 

 

 

 

 

Pierre Barjonet

Janvier 2019

 

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08/02/2019
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Compagnons

 

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Accordéon Yvette Horner et André Verchuren "Perles de cristal"

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La romance de Laurine

Saison 2 "José"

-  1  -

 

" Compagnons "

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Compagnons

 

 

 

 

« L’usage du matin me voit tout aussi bien

aller porter galette aux maçons qui débutent »…

Chante, chante Laurine quand tu t’en reviens

Du Chantier National installé sur la Butte.

 

C’est qu’ils ont soif et faim ces hommes vigoureux,

Taillant et polissant de monstrueuses pierres.

Elle aime à les voir rire en ce rituel heureux

Quand ils marquent leur lettre en clignant des paupières. 

 

Maître Jean le sait bien, soigner les compagnons

Ne peut qu’améliorer la soupe d’ordinaire.

En leur faisant porter du pain farci d’oignons

Il veut participer à l’effort qu’il vénère.

 

C’est qu’elle a belle allure en taquinant le ciel,

La blanche basilique ornée d’un campanile.

Oubliés le Maquis, la Commune partielle,

Les maîtres du devoir n’ont rien de juvénile.

 

Là haut sont les clameurs, vacarme et bruits de chaînes,

Mais quand s’en vient Laurine à l’heure de la pause

De loin leurs yeux rallongent son maintien de Reine.

Jolie porte-bonheur, jamais ne te repose !

 

Disposant son panier sur un marbre rosé,

Elle en tire le vin, du lard et des baguettes,

Du fromage de Brie, des oignons pour José.

La porteuse de pain est de celles qu’on guette.

 

Son réconfort est tel que les fiers tâcherons 

Content leur tour de France en tant que confidences

À Laurine qui  songe au val des bûcherons.

Atténuant leur exil, elle est leur providence.

 

Puis elle redescend laissant au Mont-Cenis

La poussière qui cuit les chevaux à la peine.

Elle hume le lilas du jardin d’Eugénie

Et s’arrête un instant à l’ombre du vieux chêne.

 

Le travail a repris offrant au Sacré-Cœur 

Sa meringue d’argent sucrée comme l’albâtre.

Se penchant sous l’autel, José polit le chœur

En ne regrettant pas d’avoir quitté les pâtres.

 

 

 

 

 

Pierre Barjonet

Janvier 2019

 

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04/02/2019
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