La palette de Pierre

Portrait de ma fille Aude. Très concentrée avant d'engager une pirouette (rotation), elle fixe l'emplacement de sa figure. L'importance de la piste renforce le risque que prend la patineuse face à la glace. J'ai donc souligné l'opposition entre la verticalité du patineur et l'horizontalité de la glace. Laquelle revêt bien plus de couleurs qu'on l'imagine, en autant de reflets qui s'entremêlent avec la vitesse. Le bas du corps est à peine esquissé dans des teintes sombres pour dégager le buste. La barrière rappelle la couleur orangée de la tunique (et les incrustations bleues de la ceinture) mais cette dernière semble flotter au vent de la glisse. Le patin blanc donne la direction du bras et du regard.

Le visage encore poupin de l'enfant (ma fille Anne-Laure à 2 ans) souligné par ses grands yeux, semble pris par le vent qui balaie ses cheveux, et les flots qui se déchaînent sur son vêtement, en rappel des vagues que l'on devine sans les voir au loin. J'ai rappelé le vert des terres sur son pull afin de l'intégrer davantage dans le paysage.

détail des fleurs de teintes quasiment pures et de pigments précieux (et hors de prix pour le rouge vermillon et le vert émeraude) dont l'idée était de donner un relief coloré aux plis sombres de la robe et d'apporter une touche de coquetterie à cette facture classique

détail de la cheminée ancienne et très parisienne faute de place pour de vraies cheminées de pierre dans les appartements (on en trouve également dans le Nord)

détail de la lampe à huile

détail du portrait et de la chevelure

Grande toile débutée en 1974 avec un modèle pour qui j'avais acheté cette robe tout exprès puis terminée en 1981 avec les bras de ma femme... Je m'étais confronté à quatre difficultés complémentaires pour l'équilibre général : le portrait très figuratif et tout en douceur énigmatique avec un travail de glacis, la robe noire et sa dentelle réhaussée par les petites fleurs aux couleurs vives et pures de pigments précieux (vrai vert émeraude, rouge vermillon, bleu outremer), la cheminée imposante de cuivre, fonte et de moulures en faïence, enfin la lampe à huile en cuivre et verre. Le fond (rose, laque de garance, carmin) donne fait ressortir le côté romantique d'une toile volontairement "vieillie", avec la touche de nostalgie apportée par la lampe à huile et le crucifix.

Réalisé il y a bien longtemps, à 16 ans, ce nu se voulait jaillir d'un écrin comme une perle nacrée sur fond de vagues (à l'âme)