Maureen
" The Irish Rover " (cliquer pour écouter)
Maureen
Tintant en mi bémol, la clochette annonça
Le sosie de Laurine en guise de cousine.
De ses rivages celtes, elle renonça,
S’exilant de Westport, victime de saisine.
Dans ses bras et pleurant en la dévisageant,
Laurine se souvint d’un voyage en Irlande.
Elle avait adoré, la présentant à Jean,
Maureen cueillant pour elle des ajoncs des landes.
Ensemble elles couraient grimpant sur les murets
Bâtis par les forçats de la Grande Famine.
Puis elles rebouchaient les terriers des furets
En chipies dégoûtantes et ne payant de mine.
Chaussées pour leurs huit ans de solides galoches,
Elles s’imaginaient revenir de la pêche
Frétillant d’un butin, mais c’étaient des taloches
Qui les accompagnaient quand c’était jour de prêche.
Elles s’étaient perdues, ça fait déjà quinze ans.
La tourbe avait brûlé les jeux des « sœurs jumelles ».
Avec son apprenti, désamorçant le temps,
Jean les dévisageait, la tête pêle-mêle.
Les yeux verts toutes deux, fines de taille aussi,
Elles étaient troublantes ces riantes oiselles.
Leurs cheveux flamboyaient en un chignon grossi
Cuivrant la coiffe rousse de ces demoiselles.
À la mode d’ici, Laurine était tenue.
Modelée d’élégance par l’ample tournure
Discrètement bordée de rubans soutenus
Sa robe de velours rêvait d’enluminures.
Elle a mené Maureen réserver du tissu
Dans le marché Saint-Pierre, en toile serpentine.
Enfin chez un bottier d’une voie sans issue
A fait confectionner de légères bottines.
Puis en redescendant boulevard Rochechouart
Et guettant le soleil, munies de leurs ombrelles,
Nos filles ont bien ri de voir filer des couards
Que les sergents de ville ôtaient de leurs querelles.
Pierre Barjonet
Février 2019
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