Marquises
" Le bal des marquises "
Illustration originale de Pierre Barjonet - Février 2024 - 40/30 -
Sanguine, crayonné coloré de mines Conte, de craies grasses,
de pastels à l'huile, et de cire dorée, encre de chine.
N.B. Cliquer sur la photo pour l'agrandir
(comme d'ailleurs, pour toutes les illustrations)
J'ai prévu ces deux chansons avec paroles donc,
à écouter avant ou après avoir lu le poème pour ne pas en gêner la lecture :
" Auprès de ma blonde " par Aristide BRUANT
Marche militaire traditionnelle dans les armées, datant du XVIIIè siècle.
Cliquer pour voir ce lien vers l'histoire et les paroles de la chanson
" Fanchon " Célèbre chanson du répertoire militaire
écrite en 1857 par l'abbé Gabriel-Charles de Lattaignant
et aux paroles modifiées par le général de cavalerie Antoine Charles-Louis de LASALLE (1775/1809)
le soir de la bataille de Marengo le 14 juin 1800
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Chansons à écouter avant ou après avoir lu le poème
pour ne pas en gêner la lecture.
Conseils pour mieux suivre le déroulement de votre saga :
N'oubliez-pas de visiter la rubrique du sommaire
avec un "résumé" de l'épisode en cours :
ainsi que la rubrique chronologique :
Marquises
Rose frissonne d’aise en frôlant le tissu
De ces robes de bal aux soieries et dentelles,
Couvertes de bijoux, de perles sans issue
Pour la noblesse russe exclue des bagatelles.
Elle a mission d’aider à parer les soldats
De ces atours précieux pour un bal sans princesses,
Une fête d’entrain que l’Empereur accorda
Pour égayer sa troupe en cette forteresse1.
Liouba l’aide à trier le larcin des gaillards
Revenant de maraude en des palais trop vides,
En confiant aux « danseurs » ces trésors de Boyards2,
Ces toilettes cousues de convoitise avide.
Ainsi fait, déguisés, grimés et décorés,
Les Grognards moustachus talqués de suif et poudre
En tenue de marquise au sexe édulcoré3,
S’apprêtent à danser dans la paix qu’on saupoudre.
Nicolas se réjouit de sortir son tambour
En parade musquée d’une blanche perruque,
D’un dolman en velours serti de brandebourgs,
Et souliers de chevreau saisis à un grand-duc.
Alors en ce Kremlin tiré de l’abandon
On redonne en splendeur l’éclat des Tuileries4,
Au pas de Rigaudon5, chauffant comme un brandon
Le parquet d’apparat de l’ample galerie.
Joseph a préféré ne pas se costumer,
Puis se jetant à l’eau quand s’annonce un quadrille6,
Traverse l’assemblée pour s’en accoutumer
Et se noie dans les yeux d’un sourire qui brille.
Il invite Liouba qui lui offre son gant,
Lâchant son éventail à Rose qui murmure,
Et donne à cette Dame un avis élégant
Sur son teint retrouvé loin du sort qui la mure.
Mais l’harmonie truquée du ballet des soldats
Vêtus comme des belles au jeu des marquises
Fait trébucher Liouba, près de la véranda,
Dans les bras de Joseph en une pose exquise.
Pierre Barjonet
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Cette occupation qui ne porte pas son nom se traîne en longueur, et les premiers frimas n’ont pas manqué d’inquiéter les troupes dont l’agitation se précipite au fur et à mesure que les jours passent. À l’image de leur Empereur qui s’agace d’un rien, ses grognards s’ennuient et s’encroûtent. Ils ont bien besoin de distractions. Et c’est ce qui arrivera, à la suite de leurs maraudes ayant largement complété leur butin hétéroclite. On y trouve notamment des châles, des étoffes précieuses de soie tissées d’or et d’argent, des fourrures de Sibérie, et des costumes français portés à la cour de Louis XVI dont des robes luxueuses de marquises.
Ainsi fut décidée l’organisation d’un grand bal déguisé, un véritable bal de carnaval où les vieux grognards comme leurs cadets se travestirent en marquises, épongeant la sueur qui coulait de leurs perruques par de grandes rasades de liqueurs coûteuses et d’eau-de-vie. Ce bal homérique dura toute la nuit du 27 septembre 1812 et comme le décrivit si bien le Sergent Bourgogne dans ses mémoires, il fut l’occasion « de voir des marquises françaises sauter comme des enragées, comme des tartares, allant à droite et à gauche, écartant les jambes, les bras, tombant sur le cul, se relevant pour y tomber encore. On aurait dit qu’elles avaient le diable dans le corps. » Il est vrai qu’en guise de musique, la flûte et le tambour battant la charge avait de quoi déjouer le sommeil de ces braves !
NOTES DE LECTURE ET DE SITUATION HISTORIQUE
1 Le Kremlin des Tsars.
2 Les Boyards étaient des nobles russes de haut rang.
3 Ce bal travesti où des soldats de la Grande-Armée se sont grimés en marquises à la mode de cour française en vigueur sous la monarchie de Louis XVI a bel et bien existé, à Moscou. cf. « Les mémoires du Sergent Bourgogne ».
4 Le palais des Tuileries à Paris était celui où logeait Napoléon. Il fut détruit pendant la Commune de Paris le 23 mai 1871. N.B. Il fermait la cour du Louvre à l’emplacement de l’actuel Arc de triomphe du Carrousel.
5 Le Pas de Rigaudon est un pas de danse traditionnelle du Sud-Est, mais également pour « le Rigaudon d’honneur » un air militaire traditionnel de l’époque napoléonienne des tambours d’ordonnance annonçant un événement officiel devant la troupe.
Voir cette vidéo ici : https://youtu.be/VRS1f2QVfm4
6 Le quadrille est une danse de salon du XIXe qui s’exécute à quatre couples selon plusieurs séries de mouvements parfaitement ordonnés, alors en vogue dans les cours d’Europe.
QUELQUES ILLUSTRATIONS
Un bal aux Tuileries sous Napoléon III
aux Tuileries... sous la Commune
Le palais des tuileries
L'abbé Gabriel-Charles de Lattaignant
Le général de cavalerie Antoine Charles-Louis de LASALLE (1775/1809)
Général de division après avoir été colonel du 10ème Hussards,
que l'on voit ici, charger à la bataille de Wagram le 6 juillet 1809
où il trouva la mort d'une balle en plein front.
Très affecté par sa mort à 34 ans, Napoléon dira de lui : « C'était un officier du plus grand mérite, et l'un de nos meilleurs généraux de cavalerie légère. »
On le considère encore aujourd'hui, comme étant l'un des plus grands généraux de cavalerie de son époque.
Dans la dernière lettre qu’il adressa à son épouse, il écrivit : « Mon cœur est à toi, mon sang à l’Empereur, ma vie à l’honneur. »
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