La palette de Pierre

La palette de Pierre

Lexique Saison 5 Episode 9 Faust

 

 

Saison 5, Épisode 9, Faust

 

  

 

 

Lien vers le poème Faust : ICI

 

 

 

 

 

 

 

- TIRAILLEURS & ZOUAVES À QUENNEVIÈRES, FAUST DE GOETHE  (Faust)

 

 

1/ TIRAILLEURS & ZOUAVES À QUENNEVIÈRES furent engagés dès le début du conflit tout comme les autres troupes coloniales rapatriées en Europe. Les tirailleurs Sénégalais ou Algériens comme ici à Quennevières étaient en 1ère ligne. L'État-Major ne s'en souciait guère et l'histoire montra combien ces hommes furent bien souvent considérés comme de "la chair à canons", bien que leur encadrement direct, sous-officiers et officiers, admiraient leur bravoure au combat et leur grande solidarité.

 

Mal chaussés, souvent pieds nus faute de ravitaillement, montant au feu parfois sans préparation d'artillerie, ils versèrent largement - et inutilement trop souvent - leur sang pour la France.

 

Ces hommes avaient été recrutés à l'origine en Afrique parmi les Zouaves. On considérait alors, en 1830 lors de la conquête coloniale de l'Algérie, qu'il était judicieux de s'entourer "d'indigènes" (appellation qui leur resta après). En revanche, fut créé un corps militaire de zouaves (1830 à 1962), composé uniquement de français, redevenant mixte après 1942.

 

Mon grand-père, alors Capitaine, en commanda une compagnie lors de la bataille de Quennevières.

 

Cette bataille, surnommée "l'enfer de Quennevières" (près de la ferme du même nom) se déroula du 6 au 16 juin 1915 en Picardie à l'initiative du général Nivelle. Il voulait marquer un coup d'éclat pour contrecarrer l'enlisement de la guerre dans les tranchées en allumant un contre-feu sur un nouveau front qu'en Artois.

 

Le 6 juin 1915, une large attaque des tranchées allemandes est ordonnée avec un dispositif composé de Tirailleurs et d'un Bataillon du 2ème Zouave complétant un bataillon de soutien d'infanterie, chargé de réduire le saillant ennemi de Quennevières. Malgré les succès du début avec de lourdes pertes humaines, ayant repris deux lignes de tranchées allemandes, ces dix jours de combat jusqu'au 16 juin furent un échec, ou plutôt une victoire à la Pyrrhus, chacun restant sur ses positions initiales ou presque... mais avec 10.300 soldats français tués ou disparus pour quelques mètres de terrain ! Le 2ème tirailleurs perdit 14 officiers et 1.800 hommes.

 

Lorsque des troupes renforcèrent leur position quatre mois plus tard en creusant des boyaux entre les tranchées, elles tombèrent sur un enchevêtrement de cadavres français et allemands indescriptible (voir mon poème " Faust").

 

 

 

Tirailleurs algériens montant à l'assaut

 

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Carte militaire des tranchées de Quennevrières 

(provenant de mon grand-père, le Colonel Jules Pierre Barjonet) 

N.B : La ferme de Quennevrières tout en haut. Tranchées françaises en rouge, allemandes en bleu.

 

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Voici quelques lignes extraites des "Impressions de guerre - 1914/1915" de mon grand-père, suite aux contre-attaques allemandes après l'assaut français du 6 juin :

 

" C'est à une attaque "funéraire" qu'on vit un bataillon de tirailleurs partir à la sonnerie de la charge ! - les réseaux n'ayant même pas été entamés - et l'Historique est obligée d'avouer que "notre artillerie, manquant de munitions, ne put donner à l'infanterie tout l'appui nécessaire " ! Traduisez : aucun appui - et voilà, n'était-ce pas criminel ? Puis, rentrant, décimés, éreintés aux tranchées, il fallait s'atteler à la besogne écrasante des travaux intérieurs, réparer les démolitions des projectiles, les éboulements par les pluies, consolider les abris, en faire de plus solides, de plus profonds, édifier des traverses, multiplier les boyaux de communication, les approfondir aussi, creuser des puisards..."

 

" Leurs ordres (de l'État-Major), nous nous efforçons d'y satisfaire, mais nos demandes, nos réclamations restent trop souvent lettre morte. Par exemple, c'est seulement le 6 décembre que nous recevons des chaussures pour nos malheureux tirailleurs, qui pataugent lamentablement en "sandales", certains même pieds nus, dans les fonds boueux de nos trous ! Et il n'y avait que 80 paires pour tout le Bataillon ; d'ailleurs à cette époque, quelques-uns portaient encore des pantalons de toile !"

 

" La réaction ennemie ne tarde pas à se faire sentir, tout de suite violente, principalement par un marmitage incessant et qui nous prend - formant nous-mêmes un saillant dans leurs lignes - de l'Est, du Nord et du Sud ; - il s'intensifie chaque jour, et l'existence devient infernale dans nos tranchées bouleversées, pleines de cadavres à peine recouverts de chaux vive, et sur lesquels - effroyables "tremplins" élastiques - il nous faut constamment passer... et dans les abris bien peu solides encore, nous devons nous défendre contre deux nouveaux ennemis : les rats et les immondes grosses mouches, vermine redoutable qui commence à pulluler partout ! Aussi les relèves sont-elles fréquentes. Là encore, le Commandement eût dû se faire rendre compte des conditions d'existence de la pauvre piétaille fourbue, abrutie, attendant durant de longues heures, parfois en vain, le manger et le boire, dans le sang, la boue et la pourriture ". 

 

Et pour qu'on se fasse également une idée de ce que rencontraient comme problèmes les gradés en 1ères lignes, en sus du combat, des travaux intérieurs et du quotidien fait de mort, d'angoisse et de vermine, voici un autre paragraphe incroyable, quoique... :

 

" Mais d'autres soucis, d'autres ennuis viennent nous assaillir le jour (après des nuits d'effroi et de vigilance marquée d'échos de tirs NDLR). Même lorsque l'Allemand se tient tranquille, que la pluie - l'horrible pluie "aux doigts verts" - ne nous importune plus après avoir transformé nos terriers en bouges infects, et astreints à des travaux de reconstruction difficiles, longs et éreintants, voici qu'un nouvel ennemi s'insinue peu à peu, insidieusement, sous des apparences bonasses d'abord et limitées, puis chaque jour un peu plus "rinforzando" - telle la calomnie d'illustre mémoire - dans les gîtes des pauvres "exécutants" : la terrible, odieuse et affolante paperasserie, la sacro-sainte Paperasserie que ne pourront faire reculer attaques ni combats, car l'on n'en a jamais autant fait que dans cette triste guerre, et mon frère (Charles Barjonet NDLR) à la tête d'un Régiment, là-bas, aux Éparges, "en sait quelque chose"...

Que de "papelards" à fournir, que de rapports à pondre, grands dieux ! Même et surtout dans les terriers de 1ère ligne, - en lesquels nous n'avons pas le temps de songer... Topos de toute sorte, compte-rendus sur la "progressivité" des travaux ! Des demandes, des explications sur le port du rouleau individuel du fil de fer, sur les braseros, les marmites norvégiennes (de nourriture NDLR) - tandis que les "marmites" allemandes nous sonnent - sur la confection du charbon dans les bois par des équipes spéciales, sur les séchoirs ! J'en passe, évidemment ; mais si nous demandons des grenades pour répondre à celles d'en face, vite on nous en promet, et en les attendant, on nous envoie six fois de suite, un papier nous expliquant la manière de nous en servir... Le 7 janvier, la Brigade renvoie à mon frère un compte-rendu quelconque de patrouille, parce qu'il n'était pas établi sur papier "de format règlementaire" !!! Ah ! Les Jean-F... ! Mais il faut bien, n'est-ce pas, que ces Messieurs des "secondes lignes" s'occupent et passent leur temps - s'ils ne peuvent venir nous voir - entre deux ordres d'opérations. Et en ce qui me concerne, je les vois si bien dans ce beau et splendide château d'Offémont, où il y a tant de belles chambres, tant de commodités... Je les y ai vus... "

 

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2/ FAUST DE GOETHE. Comme je l'indique dans mon poème sous les traits de José (...), mon grand-père, alors Capitaine et commandant une Compagnie de Tirailleurs, trouva sur le corps d'un officier allemand, "pris au combat", ce petit livre du Faust de Goethe (édité en 1912 à Leipzig) ainsi que sa Croix de Fer.

 

Ces "souvenirs", pour terribles qu'ils sont, constituent un témoignage bouleversant - m'ayant d'ailleurs inspiré ce poème "Faust" - montrant que même chez l'adversaire pourtant décrit comme une bête féroce, et à l'instar de l'officier allemand le Capitaine capitaine von Rauffenstein (joué par Érich von Stroheim) du film de Paul Renoir "La grande illusion" , existaient des hommes empreints de philosophie et de poésie sur le sens dramatique à donner à la vie, à l'amour et... à la mort.

 

 

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Est-il utile de parler de Johan Wolfgang von Goethe, né en 1749 et mort en 1832, dont voilà ici la plaque commémorative que j'ai photographiée sur les bord du Rhin à Rüdesheim...

 

Poète de renom, écrivain célèbre, illustre créateur du Faust figurant comme l'une des grandes oeuvres de la littérature allemande, il fut même sollicité par Napoléon 1er lors de l'entrevue d'Erfurt !

 

Son Faust qui passa un accord avec le diable, Méphistophélès lui faisant rencontrer Marguerite... donna lieu au fameux opéra de Charles Gounod en 1859 (en musique d'accompagnement de mon poème Faust), comme d'ailleurs à plusieurs oeuvres lyriques, orchestrales dont "La damnation de Faust" d'Hector Berlioz (1846), mais aussi de Schumann, Wagner, Liszt,  Mahler, Stravinski, ainsi qu'au cinéma : Georges Méliès, René clair avec "La beauté du diable" où jouèrent Gérard Philipe et Michel Simon, ou plus récemment Brian de Palma, et en littérature bien sûr (Heinrich Heine, Pouchkine, Balzac, Tourgueniev, Oscar Wilde, Mac Orlan, Paul Valéry, Marcel Pagnol, Alfred Jarry, Jean Giono, Thomas Mann, Michel Butor, etc.

 

 

 

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03/08/2019
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