L'ascension
Les lumières de la ville (Charlie Chaplin)
L’ascension
Il est tôt ce matin que déjà les chevaux
Ballotant du harnais contiennent leur allure.
La ville est engorgée de ces landaus rivaux
Bousculant les coupés à chaque bosselure.
Assis dans un fiacre clouté de cuir qui blesse
Nos amis déroulent la chaussée de basalte.
Ils encombrent ravis la foule qui se presse
Soulevant aux faubourgs des nuages d’asphalte.
On suffoque déjà quand se dresse la Tour.
Nos coiffes oscillent sous la brise de Seine,
Nos jupes coupées droites vrillent nos atours
Comptant sur leurs bottines pour nous mettre en scène.
Galamment, c’est José qui retient l’ascenseur
Jusqu’au troisième étage ébloui de vertige.
Nous restons étourdies, glacées tel un penseur,
Figées comme donzelles perdant tout prestige.
Puis le vent nous engage à tousser vers le bas
En suivant le ressac des marées parisiennes,
À l’aplomb de ce phare aux trop nombreux débats.
Nous plaquons nos chapeaux comme des Arlésiennes.
Par bravade soudain, nous nous hissons en haut !
Surplombant l’océan des poutrelles qui fouettent,
Nous jouant des éléments titillant notre peau,
Susurrant à la Seine des vagues de mouettes.
Notre soif étanchée, nous plongeons de niveau.
Du palier du deuxième en escaliers à suivre,
Glissant dans la volière d’arcs et soliveaux
L’hélice nous aspire en sa rampe de cuivre.
Au premier, nous trinquons, goûtant de la vodka,
Un blinis au caviar dans le restaurant russe.
Des ouvriers sifflotent gravant sans fracas
Nos prénoms sur du fer rivé de papyrus.
Au sol portant au ciel ses amarres de fer
La Tour nous fait un signe d’amour et de maille
Croisant pour nos destins l’espoir qu’elle profère
D’un nouveau siècle heureux enrichi de semailles.
Pierre Barjonet
Février 2019
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