Moskova
" Le repos du bivouac "
Illustration originale Pierre Barjonet - Août 2023 - 40/30 -
Sanguine et craie Conté
N.B. Cliquer sur la photo pour l'agrandir
(comme d'ailleurs, sur toutes les illustrations)
Franz SCHUBERT, Sérénade " Le chant du cygne " pour piano et violon
Conseils pour mieux suivre le déroulement de votre saga :
N'oubliez-pas de visiter la rubrique du sommaire
avec un "résumé" de l'épisode en cours :
ainsi que la rubrique chronologique :
Moskova1
Le regard de Joseph se perd en survolant
L’immense tombe offerte à l’ivresse des hommes
Tandis que ses mains froissent son carnet violant
Le champ des trépassés dans l’ombre de sa gomme.
Il l’avait désiré, lui aussi, ce combat,
Près de Borodino1 comme ultime redoute2,
Superbe en sa folie, tanière où succomba
Cet extrême rempart de flèches2 en déroute.
On charge les mourants pour un piètre destin,
Amputant tout espoir d’éblouir quelque belle.
On brûle les cadavres grillant le festin
Des loups et des corbeaux, vautours en ribambelle3.
La pluie4 ponce les os des soldats et chevaux,
Fait ruisseler la boue des Français et des Russes
Dans un fleuve mêlant le sang de ces rivaux
Dégoulinant des chairs crevées faisant chorus.
Son crayon trace enfin l’horizon de Moscou,
Donnant en perspective un semblant d’enthousiasme,
Mais son carnet s’encrasse en larmes tout à coup,
Maquillant le vélin de dépit et marasme.
Surgissant des fumées, Nicolas le surprend,
Lorgne vers son dessin d’un regard fort perplexe,
Ne comprenant pourquoi son Joseph entreprend
De croquer la misère à nul autre complexe.
« Regarde donc les morts, comme ils sont bienheureux ! »
Déclare-t-il sitôt, en lui narrant la scène ;
Celle où Napoléon dont le dos douloureux
Chercha le réconfort d’une position saine.
« Oui, c’est au p’tit tondu que j’prêtai mon tambour,
Pour allonger ses jambes, ses dignes gambettes !5 »
Et se prenant à rire il étreint à rebours
Son tambour historique en liesse de courbettes.
Brusquement il s’arrache à l’écho du rappel6,
Abandonnant Joseph à son fusain lugubre,
À son carnet meurtri sous les coups de scalpel
Éventrant l’illusion d’une gloire salubre.
Pierre Barjonet
Août 2023
Saga poétique romancée « Le carnet gelé » créée par Pierre BARJONET
a/c janvier 2023
Saison 1 « Marchons », Poème 10 « Moskova » (Août 2023)
Enfin, nous y voilà ! La grande bataille que Napoléon 1er appelait de ses vœux s’annonce le 7 septembre 1812 à proximité de Moscou (124 km) et succède de peu à celle de Chevardino opposant l’arrière-garde russe et l’avant-garde française, le 5 septembre. Inutile de dire que cette nouvelle le transporte de joie !
Ne voulant pas alourdir le complément de mon poème, je vous invite à visiter ce site dédié à l’Empereur Napoléon 1eroù un récit précis de cette grande bataille en est dressé :
https://www.napoleon-empire.net/batailles/moskowa.php
Cette bataille ne fut pas décisive malgré son engagement apparaissant comme étant le plus grand de la Campagne de Russie et l’une des plus épouvantables boucheries faisant 70.000 morts et blessés au total des 250.000 combattants (30.000 français et 40.000 russes). On a coutume de dire que le vainqueur est celui qui conserve l’avantage numérique des troupes ainsi que la maîtrise du terrain, donc c’est une victoire de Napoléon. Mais son adversaire, le général Koutousov, préféra, contre l’avis de son État-Major, retirer son armée pour la préserver en vue de combats ultérieurs. L’histoire lui donnera raison...
Je vous recommande de lire l’ouvrage de Léon Tolstoï « La guerre et la paix » publié sous forme de feuilleton entre 1865 et 1869 qui fut un immense succès mondial.
Je vous en propose un excellent résumé publié par le site dont je vous ai déjà parlé « Russia Beyond », ici :
https://fr.rbth.com/art/88577-guerre-paix-leon-tolstoi-bref-resume
Je vous invite aussi à voir ou revoir les 2 films intitulés « Guerre et paix » :
- Sorti en 1956, le film américano-italien de King Vidor avec Audrey Hepburn, Mel Ferrer (son mari dans la vie) et Henry Fonda.
- Sorti en 1962, le film soviétique de Sergueï Bondartchouk qui, face au succès du film américain considéré comme un affront national, conçut une œuvre remarquable filmée et diffusée en 70 mm ne lésinant guère sur les moyens gigantesques obtenus avec 120.000 figurants et 9.000 chevaux... La presse fut unanime à vanter ses incroyables fresques des batailles (Austerlitz, puis Borodino) et la beauté intemporelle de ses images.
NOTES DE LECTURE ET DE SITUATION HISTORIQUE
1 La bataille de Borodino, du nom du village proche, se tint le 9 septembre 1812 sur les bords de la Moskova. Les Russes la nommèrent ainsi, mais Napoléon 1er lui préféra le nom de Moskova, ouvrant de fait les portes de Moscou distante de 124 km.
2 Cette bataille, conduite du côté russe par le général Mikhaïl Koutousov, devait enfin arrêter la Grande Armée napoléonienne en lui interdisant la route de Moscou, et ce, contrairement à la tactique de la fuite en avant précédente, de manière (enfin) frontale. Il fortifia en hauteur une grande redoute ainsi que trois autres plus petites appelées « flèches », toutes largement pourvues d’artillerie.
3 Il était d’usage à la fin des combats, de soigner pêle-mêle les hommes des camps adverses ainsi que de brûler les cadavres et, ou de les enterrer dans des fosses communes, une fois dévêtus (nus). Leur équipement (fusil, sabre, cartouchière, sac, bottes et selon le cas, uniforme) était aussitôt réaffecté par l’intendance. Mais les « vautours » des champs de bataille attirés par la convoitise suivaient les troupes et se précipitaient sur le champ de bataille, parfois même avant la fin des combats...
4 Comme de bien entendu, une pluie glaciale s’invita, transformant le terrain en champs boueux, inondant les fosses où le chirurgien en chef de la Grande-Armée, le Baron d’Empire Dominique-Jean Larrey y versait le fruit de ses amputations...
5 Le court instant de repos de Napoléon assis sur une chaise en posant ses pieds sur un tambour, que j’évoque ainsi dans mon poème est en fait celui de la veille de la bataille d’Austerlitz. Il est un fait qu’il ne dormait que très peu, 2 à 4 heures par nuit, et pouvait récupérer rapidement de sa fatigue en s’adossant quelque instant n’importe où. En l’occurrence, ce fut sur le lieu de son bivouac de guerre, entouré de ses maréchaux et généraux d’Empire.
6 La sonnerie du rappel ou plutôt, concernant Nicolas, la batterie frappant « le rappel » ou « l’assemblée » (au tambour) prévient les troupes en présence de rejoindre leur position initiale en se réunissant par compagnie.
QUELQUES ILLUSTRATIONS
N.B. Photos tirées en partie du site " Russia Beyond " qui retrace entre autres, et à mon avis de façon fort objective, l'histoire de la Russie.
Voir le site en suivant ce lien : Russia Beyond français
La bataille de Borodino / La Moskova
Napoléon, la veille de la bataille d'Austerlitz
N.B. ce qui m'a inspiré mon dessin avec le tambour
Le généralissime Mikhaïl Koutouzov
Borodino aujourd'hui et son mémorial
Le roman de Tolstoï
photos du film américain de 1956
photos du film russe de 1962
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