L'océan
" Vague mortelle " Illustration originale Pierre Barjonet
- avril 2023 - 40/30 - Sanguine, craie Conte et crayons de couleur
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(comme d'ailleurs, sur toutes les illustrations)
" Christophe Colomb " Musique de film
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L'océan
Le répit du ressac retombe face aux vents,
Vents du Nord et de l’Est échauffés par les flammes,
Vents du souffle cosaque en torches s’élevant,
Vents des soldats traînards1 reniant leurs oriflammes2.
Joseph hurle sa rage au perfide océan
Qui charrie les récifs de ses forêts rebelles,
Qui donne aux foins la braise des champs du néant
En assoiffant l’envie de pains et mirabelle.
Et l’onde se déchaîne écumant de fuyards...
Par milliers la camarde engloutit ses victimes,
Par vagues les chevaux traînent leur corbillard,
Et les courants emportent de l’homme l’estime...
Comme le sel rincé, l’armée s’agite et fond
Sans le moindre combat hormis des seuls cosaques3,
Puis le typhus aidant à plonger vers le fond,
Ne reste plus qu’aux loups à mordre les casaques.
La violence est partout, se payant sur les serfs4,
S’alimentant de faim, de crimes et vengeance,
Immolant la candeur comme à la chasse au cerf,
Brassant les officiers1, noyant toute exigence.
Les troupes ont perdu le cap des vents porteurs,
Leurs navires dérivent au chant des sirènes,
Et leur route prend l’eau d’avec les déserteurs,
Pirates affamés de terreur qui gangrène...
Rose a vu le fardeau d’une fillette en pleurs
Dont les parents pendus balancent près du chaume
De l’isba5 calcinée par ces monstres violeurs,
Blottie contre sa sœur, ne lâchant pas sa paume.
Rose a bercé sa peur puis creusa derechef
Une tombe fleurie s’ancrant dans la prairie.
Puis emmenant la fille elle borda sa nef,
Voguant loin des brisants de son pays chéri.
Quand la lune engloutit la peur loin des périls,
Rose alluma le cœur de l’enfant sacrifiée
En lui jurant l’amour sur l’honneur du baril6,
Et toujours protéger ses grands yeux terrifiés.
Pierre Barjonet
Mars 2023
Saga poétique romancée « Le carnet gelé » créée par Pierre BARJONET
a/c janvier 2023
Saison 1 « Marchons », Poème 6 « L'océan » (mars 2023)
S’étant enfin décidé à quitter Vilna, Napoléon se dirige vers l’Est, la route de Moscou, et s’approche de Vitebsk qu’il rejoindra le 28 juillet 1812. Le 22, il est à Ouchtachi et multiplie ses instructions pour arrêter et détruire les fuyards, traînards et pillards de toutes sortes qui fuient la Grande-Armée et mettent à sac les villages qu’ils traversent.
Il est confronté à de sérieuses difficultés de défaut de gendarmes pour réduire les traînards, de manque de vivres et de fourrage suite à la politique de la terre brûlée des Russes qu’il commence à subir, de recherche vaine des troupes russes qu’il ne parvient pas à isoler en vue d’une véritable bataille, et comme chaque jour, du harcèlement des redoutables cosaques, sans oublier les maladies qui frappent et emportent hommes et chevaux au rythme d’au moins 6.000 morts par jour de dysenterie et du typhus...
NOTES DE LECTURE ET DE SITUATION HISTORIQUE
1 Durant l’été 1812, par suite de la faim, de la soif, des maladies, et de la chaleur torride accentuée par les marches forcées, des troupes dispersées par la cadence des déplacements, des « traînards », n’hésitèrent pas à s’en prendre à leurs officiers en retournant leurs armes contre eux, quand il ne s’agissait pas d’officiers qui prenaient à leur côté le parti de déserter en bande de pillards. La répression qui s’ensuivit fut naturellement impitoyable et exemplaire.
2 Une oriflamme est un petit étendard long et étroit servant selon le cas de bannière décorative ou comme ici, de fanion d’unités d’un même régiment, comme on en trouvait notamment sur les lances des lanciers et des dragons.
3 Les casaques ont plusieurs sens, mais là, il s’agissait de longs manteaux que les hommes portaient la nuit.
4 À l’origine, les moujiks ou paysans russes étaient libres, bien que considérés de fort basse condition. Mais à partir de 1593, leur sort fut comparable à celui des serfs du Moyen-Âge français, donc rattachés exclusivement à une terre dépendant de leur seigneur et maître, pratiquement comme des esclaves. Il faudra attendre le règne du Tsar Alexandre II qui décida d’abolir le servage en 1861. Assassiné en 1881, il fut surnommé « le tsar libérateur ». Il faut bien voir qu’à l’époque, pas si lointaine... il existait, pas moins de 50 millions de serfs servant pour moitié 100.000 familles nobles, et pour l’autre les domaines de l’État, sur une population de...60 millions d’habitants !
5 Une isba est une petite maison traditionnelle Russe faite de rondins de bois.
6 En tant que vivandière admise dans la Grande-Armée, Rose jouit d’un statut protégé lui donnant un certain nombre de droits, comme de devoirs. Elle a comme emblème officiel un petit tonnelet ou baril d’eau-de-vie, de genièvre, mirabelle, schnaps ou vodka qu’elle vide régulièrement en parcourant les colonnes de soldats pour les réconforter.
Citons la fameuse « Marie tête de bois » qui suivit la Grande-Armée en épousant un grenadier en 1805 et tomba sur le champ de bataille en 1815, victime d’un biscayen (balle de fonte de la grosseur d’un petit œuf) lui perçant son tonnelet, puis d’un autre la frappant au visage. Juste avant de mourir, elle rétorqua à un soldat agonisant auprès d’elle et lui ayant dit « qu’elle n’était pas belle ainsi », « qu’elle pouvait quand même se vanter d’être fille, femme, mère et veuve de troupier ! »
QUELQUES ILLUSTRATIONS
Les serfs Russes
Achat de serfs...
Annonce de l'abolition du servage
Une isba traditionnelle (toute en bois)
très modeste...
et un peu moins...
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