La Grenouillère
Polka : " Perles de cristal " Accordéon
La Grenouillère
Et la barque s’agite en autant de reflets
Que les peintres en joie tourmentent de leurs rames…
Une branche trop basse en veine de soufflet
Manque de renverser notre dimanche en drame.
Ah, comme ils s’accordent, ces deux Maîtres gredins
Pour mouiller ma toilette à l’eau de leur détrempe,
Et comme ils s’y entendent mes preux citadins
À chalouper le temps, en pause d’une crampe !
L’île de la Chaussée m’inonde de soleil
Si loin de mon Irlande en manque coutumière.
Juin darde ses passions telle une nuée d’abeilles
Me butinant, Maureen, au miel de la lumière.
On accoste discrets sous d’amples frondaisons.
Claude taille des joncs pour sécher ma tunique,
Ma jupe et mon corset, mes dessous de saison…
Auguste a déplié son chevalet unique.
Je frissonne d’aimer les couleurs fredonner
La gamme des pigments débusquant sur la mousse
Ma pudeur chavirée par cette randonnée
Feinte d’imaginer mon empreinte de rousse.
Cela faisait vingt ans qu’ils n’y étaient venus
Mes deux peintres gourmands de la Seine en quenouille,
Filant mes vêtements, me laissant toute nue
Entre scène et bosquet, nacrée qui s’agenouille.
Les toiles enroulées dans de vertueux fourreaux
Ne livreront mes reins à cette « Grenouillère »
Grouillant de vieux fripons, de gredins sans bourreaux,
De filous et mendiants portant leur genouillère.
La cohue bousculée, nous en séchons le bain,
Nous plongeant dans le bal aux filles fort jolies
Naïves ou cambrées, sans larbins ni bambins,
Vrillant du canotier les messieurs trop polis.
Puis à l’heure impalpable entre absinthe et rosé
Sautant dans la polka, délaissant les avances
Je m’enivre de vie, me teintant de rosée,
Et m’en reviens nager dans ce bain de jouvence.
Pierre Barjonet
Mars 2019
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 27 autres membres