La bombe
Musique du film "Le Parrain"
La bombe
Une déflagration d’un noir assourdissant
Porte soudain l’écho de la mort des palombes
Avant de se briser en débris bondissants
Puis en silence odieux recouvrant la colombe.
Alors, comme un essaim d’abeilles renversé
Les hommes suffoqués s’affolent sous la poudre.
Leur peau gratte le sol de douleur traversée
Se mêlant au porphyre en la pourpre de foudre.
Déversant la nouvelle en vagues de chagrin,
L’ouvrier du faubourg lève le poing aux nues.
Il tempête son deuil dans l’orage sans grain
Et clame son effroi plus bas que l’avenue.
Mais il se dit déjà que cette bombe-là
Fume de Ravachol, le sinistre anarchiste.
Brisant le blanc chantier d’un brûlot qui roula
La machine infernale a déteint sur le schiste.
Comme sur les falaises guettant leurs marins
Ou par-dessus les puits des mines diaboliques,
Les femmes déjà veuves sondent le terrain.
L’innocence succombe au crime symbolique !
Dans un coin, recueillis par de vaillants maçons
Des blessés assoiffés sortent de la bourrasque
Tandis que le tocsin rappelle sans façon
Sapeurs ou sauveteurs et soldats portant casque.
Pablo n’y était pas ni Laurine non plus ;
Avec Maureen et Jean, se sont rués sur la Butte.
Ils ont trouvé Manuel meurtri sur un talus.
Faible il leur a souri se crispant dans sa lutte.
On le porte conscient au nouvel hôpital.
Il délire bientôt avant Lariboisière.
Maureen court le rejoindre, le veille et puis l’installe.
José vient de surgir crachant de la poussière.
Ses compagnons sont morts, figés d’éternité,
Dormant du grand voyage ouvert au crépuscule.
Éperdu dans un cri manquant d’humanité,
Il enserre Laurine en la lueur qui bascule.
Pierre Barjonet
Février 2019
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