Commères
Edith Piaf " Padam, padam "
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La romance de Laurine
Saison 1 "Laurine"
- 6 -
" Commères "
Commères
Je m’en vais vous le dire en confiant ce secret.
Ce n’est plus du levain, mais Jean qu’elle ensorcelle.
Oui, cette gourgandine en cheveux peu discrets,
C’est bien son testament qu’elle vise et morcelle.
Même son apprenti s’emmêle les pinceaux
Pour n’avoir pas sucré le pain bénit de messe.
Pour sûr qu’il ne sera pas bien longtemps puceau…
Laurine est un démon, n’allant pas à confesse !
Et si je vous contais ce qui fait son chagrin,
Quand le matin parfois et sans délicatesse,
On la voit sangloter à propos d’un marin…
Elle a dû l’estourbir, folle scélératesse !
Si Doriette savait ce que devient son Jean,
Laissant la demoiselle goûter aux pralines,
Elle rétribuerait le diable en quelque argent.
Même les napperons ont des airs de câline !
Et voyez ces tissus pris au marché Saint-Pierre
En reste de saison, débordant de violettes,
Jusqu’au satin lamé de sa fière guêpière…
Ne manque que le tulle à l’étrange follette !
L’autre jour au comptoir en nous servant du thé,
La voici qui sifflote comme une alouette !
Vous n’imaginez pas combien Jean s’est hâté
De croiser ses yeux verts lui offrant sa silhouette.
Et puis il y a le pain du marchand de marrons,
Pesé, bien emballé, en guise de sourire,
Quinze sous les deux livres et deux macarons.
Pour elle c’est les pauvres qu’on doit secourir !
Mais le pire écoutez : Jean lui a fait venir
Ici dans sa maison, Nastasia la coiffeuse,
Car il s’est entiché d’elle en son devenir.
Or Laurine n’est rien, rien qu’une pauvre gueuse !
Allons, il se fait tard, la soupe n’attend pas.
Et chacune s’en va, mâchant son amertume,
Égrenant son venin en songeant au repas,
Persiflant, ruminant, comme il est de coutume.
Pierre Barjonet
Janvier 2019
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