Brasier
La romance de Laurine
Saison 1 "Laurine"
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Brasier
Brasier
Perdue dans un cafard hivernal,
Frêle et grelottant sous sa pelisse,
Elle s’avança sans que ne crisse
En dérapant, le gel infernal ;
Laurine frissonna.
Se méfiant des vieux pavés d’Anvers
Elle emprunta le bras d’une rampe.
S’y agrippant à force de crampes
Son cœur lui parut battre à l’envers ;
Laurine tituba.
Épuisée, n’entrevoyant d’issue
Qu’en plongeant dans le marché Saint-Pierre,
Livide et clignotant des paupières
Elle aborda le feu des tissus ;
Laurine s’engouffra.
Rayons à faire pâlir les rois,
Feutre et Prince de Galles en bobines,
Clientes envoûtées qu’on embobine,
Calicots gonflés piégeant leurs proies ;
Laurine se livra.
Le brasier de soieries se tordait,
Cravatant les voilettes de paille,
Chevauchant les bouclettes sans maille,
Calcinant la lisière du dais ;
Laurine s’enflamma.
Suédine ou popeline en rubans,
Métrés de galons pour encolure,
Cachemire offrant si chaude allure,
Moleskine empilée sur un banc ;
Laurine s’en coiffa.
Fantaisies de madras imprimé,
Arrivage de lainage vierge
Déballage de coupons de serge
Draperies de tulle comprimées ;
Laurine s’en para.
Broderies fronçant des molletons,
Lingerie précieuse en mousseline,
Vigogne de flanelle orpheline,
Chanvre, tweed et jetés de coton ;
Laurine se donna.
Châles de mohair ou d’angora,
Cascade d’étoffes qu’on décale,
Braises de jacquard ou de percale
Velours et brocard qu’on arbora ;
Laurine en succomba,
L’envie la consuma.
Pierre Barjonet
Janvier 2019
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