Marché
Marché
Je me pressais contre les étals,
Guidé par le parfum des olives,
Heurtant parfois de frêles solives
Arrimées à des poids de métal.
Je chapardais une jeune fraise
Orpheline entre deux gros melons,
Évitant de justesse un frelon,
Et succombant à son cœur de braise.
Je m’inquiétais des festins d’hiver,
De la table enrubannée de fêtes,
De l’andouille ou du pâté de tête,
Pour rassasier le fier Gulliver.
Je retroussais les cloisons de toile
Emprisonnant de folles senteurs
Cueillies sur les terres de planteurs,
Piégées au sein de l’ombre des voiles.
Je m’inondais des reflets d’argent
De l’épée d’espadons exotiques
Perdus dans la glace chaotique
D’un vieux poissonnier les déchargeant.
Je m’envolais au-delà des rives
Des citrons et juteux ananas,
Des cannes à sucre que l’on fana,
Sans les pamplemousses à la dérive.
Je m’imprégnais d’effluves du ciel
De ces gâteaux parsemés d’épices.
D’amandes et pignons si propices
Aux saveurs sublimées par le miel.
Je salivais devant les terrines,
Médaillons de chevreuils mordorés,
De cailles et de faisans dorés,
Par les couleurs ambrées des verrines.
Je vacillais devant le Beaufort,
Ou la Belle des champs loin des moines
Priant au temple du patrimoine,
En me damnant dans ce château fort.
Je m’écartais de la citronnelle,
Recherchant les sucs d’un petit vin,
D’un cépage oublié, mais divin,
D’un breuvage enfoui sous la tonnelle.
Je m’enfonçais, porté par le vent
Ondulant aux clameurs de la foule
Et des bonimenteurs sous la houle,
Puis, me hâtai sous les paravents…
Pierre Barjonet
Janvier 2019
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